La Médina d'Assilah

La ville d’Assila est Située sur la côte atlantique, à 40Km environ au sud-ouest de la ville de Tanger. Elle constitue avec Tanger et Sebta un « pont » entre les deux continents africain et européen.

Elle jouit d’un patrimoine architectural riche et constitue un modèle remarquable de tissu urbain traditionnel conservé et réhabilité. Son fort potentiel patrimonial caractérisé par une imposante fortification, classée sur la liste du patrimoine national, ses édifices d’intérêt historique et architectural et ses équipements culturels de premier ordre, jouent un rôle important dans la promotion de son activité touristique et culturel tant au niveau national qu’international notamment pendant la période estivale.

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Pendant les trois dernières décennies, la médina d’Assila a bénéficié d’une série d’initiatives à caractère culturel et d’un mouvement prononcé de restauration et de réhabilitation qui ont permis de sauvegarder son patrimoine historique et architectural et de générer des retombées positives certaines sur l’image de la ville toute entière et sur le développement et la promotion de son activité touristique.

Aperçu historique
Médina d'Assilah

Non loin de Zilil, ville antique située à Dchar Jdid à 13 kilomètres au nord-ouest, Assila doit son origine, d'après al-Bakri, fameux géographe arabe du XIème siècle, à un ribat où venait s'installer une garnison, remplacée par la suite des marchés auxquels venaient des immigrants andalous en montant leurs propres tentes.

D'ailleurs, les pièces de monnaies retrouvées prouvent qu'Assila existait déjà depuis le début du IXème siècle. Les Idrissides y avaient construit une enceinte durant la première moitié du IXème siècle. En 933-934, les habitants de la ville, voulant se débarrasser des Idrissides, demandèrent l'aide du calife Abd Al-Rahman III al-Nasir et finirent par remettre la ville entre ses mains.

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Au XIIème siècle, Asilah est en pleine décadence, mais à partir du XIVème siècle, la ville et son port jouissent d'un trafic très actif : les Majorquins, les Catalans et les Génois y font du commerce. En 1307, cinq compagnies de Barcelone délèguent des représentants commerciaux à Asilah. Les Génois y possèdent des foundouk. Ils commercialisent le blé et la laine. L'activité commerciale des Génois reste florissante après l'occupation de la ville par les Portugais. Après leur retrait devant le sultan mérinide Abd al-Hak, le wattaside Mohamed al-Cheihk s'y installe et y fonde entre 1465-1471 l'émirat wattaside de Habt jusqu'à l'occupation portugaise.

Le 24 août 1471, sous le règne du roi Alphonse V, les Portugais prennent Asilah. Ils y construisent une place forte, avec un donjon et une vaste enceinte. En août 1550, le roi Jean III la fait évacuer et en 1577, elle est réoccupée par le roi Sébastien afin de préparer l'expédition d'Oued al-Makhazin, en 1578. En 1592, le roi d'Espagne et du Portugal, Philippe II restitue la ville au sultan saadien al-Mansur al-Dahbi.

Au XVIIème siècle, Ghaylan, chef de la résistance au nord-ouest s'installe dès 1652 à Asilah. À partir de ce moment, il organise son mouvement de résistance contre les Portugais, puis contre les Anglais de Tanger et enfin les Espagnols à Larache. Moulay Ismail, après avoir récupéré la ville des mains des Espagnols en 1691, ordonne à son gouverneur Ahmad Ben Haddou d'y construire une mosquée, une médersa et un hammam et de la repeupler de Rifains.

En 1829, Asilah est attaquée par la flotte autrichienne et de nouveau par les Espagnols en 1860 lors de la guerre de Tétouan.
À partir de 1906, le nom d'Asilah revient au-devant de la scène : Ahmed Raysouni en est le maître avec le soutien de Moulay Abd al-Hafid et est nommé pacha ainsi que gouverneur du Fahs et Anjra et il y édifiera son palais.

Description du tissu urbain

S’étendant sur une superficie de 7 hectares, la médina d’Assila est caractérisée par sa remarquable centralité, son aspect homogène et son originalité par rapport à d’autres médinas. Ses principales composantes urbaines sont : les fortifications d’origine islamique et portugaise ( murailles, bastions et portes), les quartiers, les places, les voies et les édifices à caractère domestique et religieux revêtant un intérêt historique et architectural.

La médina d’Assila compte 5 quartiers (hawmat) : quartier al Kissaria, quartier Ben Ayyad, quartier Mgima’ et quartier Krikia. Ses principales artères sont celles qui relient Bab al Homar à Bab al Bhar et à Bab al Kasba et Bab al Bhar à Borj krikia.

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Les autres rues s’organisent selon l’orientation nord-est et sud-ouest, en traversant la médina en sa longueur et en sa largeur et desservent les quartiers résidentiels et les rues commerciales.

Sa Kasba, citadelle rectangulaire datant de l’époque portugaise, était jadis une place forte entourée de murailles qui abritait les résidences du gouverneur et du chef de l’armée portugaise. Actuellement, c’est un espace ouvert peu bâti contenant quelques habitations, un équipement culturel de taille (le centre Hassan II des rencontres internationales) et la Grande Mosquée. Pendant les deux dernières décennies, la médina d’Assila a bénéficié d’une série d’initiatives à caractère culturel et d’un mouvement prononcé de réhabilitation et de rénovation qui ont permis de sauvegarder son patrimoine historique et architectural et de générer des retombées positives certaines sur l’image de la ville toute entière et sur le développement de son activité touristique.

L’enceinte

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La construction des premières murailles de la médina aurait été ordonnée par Mousa Ibn Abi Al Afia vers 942-943 ap.jc. Les murailles actuelles sont l’œuvre des portugais qui ont décidé vers 1505, sous les soins de l’architecte Diogo Boytac (1460-1528), de renforcer les défenses de la ville et la transformer en une place de guerre solide et massive après plusieurs attaques administrées par les forces des wattassides.

L’enceinte de la médina, classée comme monument historique le 24 janvier 1996, à la forme d’un parallélogramme irrégulier dont trois côtés donnent sur l’arrière pays et un côté courbé épouse la forme du rivage et son tracé n’a guerre changé depuis la fin du XVème siècle. Elle s’étend sur une longueur de 1200m et sa hauteur varie entre 5 et 7 m. Elle est percée par 5 portes et pourvue de 9 tours et bastions.

Les murailles, du côté terre, étaient entourées d’un fossé sec d’environ 8m de profondeur moyenne, soutenu par des murs de pierre (actuellement l’Avenue Hassan II et la rue Ibn Battouta) qui transposait au fond l’aqueduc et certainement un pont-levis devant la porte de la ville.

Dans les années 80, elle a fait l’objet d’une grande opération de restauration de la part de la municipalité de la ville sous l’égide et le suivi technique des services compétents du Ministère de la Culture.

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Les bastions et les tours

Les bastions et les tours de la médina d’Assila ne constituent actuellement que des éléments de repères et de référence pour les habitants après avoir été des structures de défense et de contrôle. Elles ont des formes et des dimensions différentes et percent tous les côtés de l’enceinte.

Un plan de la médina de 1939 laisse apparaître 9 bastions et 3 tours dont la plupart existent encore de nos jours sauf pour Baluarte de Pite Joao (Bastion Petit Jean) qui fût occupé par des habitations et qui se situait entre Bastion de la ville (Borj al-Homer) et Bastion de Santa Cruz (Borj Na’am ou Borj El Kasba) juste derrière l’actuelle Grande Mosquée. Les autres bastions sont : Bastion de la plage (Borj El Kaid el Momtaz), Bastion Antonio da Foncesca (Borj Souk Ahfir), Bastion de Tambalalam (Borj Lalla Rahma), Bastion de la Cuirasse (Borj Krikia), Bastion de Saint François (borj Sidi Mimoun), Bastion de la Patte d’Araignée (Borj école Sidi ali Ben Merzouk).

La tour el Kamra

La plus importante des tours de la médina d’Assila est la tour el Kamra, située au nord de l’enceinte et à côté de Bab Bhar. Par sa hauteur qui s’élève à 17m, ce donjon, appelé par les portugais Torre de Managem, domine la médina, l’arrière-pays et la côte.
Il est le seul élément qui subsiste du château du gouverneur. Ses traits architecturaux renvoient au style de l’architecte Boytac, ce qui remonterait sa construction à 1509. Au lieu d’une fonction militaire, la tour d’El Kamra assurait une fonction publique et cérémoniale : sa grande fenêtre-balcon, tournée vers la place publique, servait pour les apparitions officielles du gouverneur et sa distribution interne, qui dénotait une hiérarchie symbolique, laissait apparaître une prison au niveau du sol, une salle d’audience où le gouverneur recevait et donnait des ordres au nom du Roi et probablement une salle de garde au premier étage. Son bon état de conservation actuel et sa fonction de galerie d’exposition, est dû à une opération de restauration et de mise en valeur réalisée en 1994 par la Fondation portugaise Calouste Gulbenkian.

Les Portes

L’enceinte est percée de 5 portes qui assurent la communication entre le reste de la ville et l’intérieur de la médina. Avant la colonisation espagnole survenue en 1912, elle n’était pourvue que de deux portes : Bab el Bhar (porte de la mer), située dans le rempart nord au pied de la tour al Kamra et connue au temps des portugais par Porta Riviera et Bab el Homar ou la Porta da Vila portugaise, percée dans le rempart est de l’enceinte. Bab al Kasba a été ouverte en 1920 dans la partie nord de l’enceinte par l’administration espagnole pour permettre l’accès mécanique à l’intérieur de la médina et créer la liaison directe avec le quartier espagnole. Les deux autres portes, beaucoup plus récentes, sont Bab es-Souk, ouverte dans le rempart est au nord de Bab el Homar, et Bab Krikia percée dans le rempart sud.

Porte-bastion el-Homar

L’ancienne “Porta e Baluarte da Vila” de l’époque portugaise est une porte-bastion qui perce le rempart sud de la médina et constitue l’un des plus anciens et célèbres édifices fortifiés d’Assila. Elle forme un avant corps par rapport au niveau de la courtine et une baie d’entrée au milieu d’une tour tronco-cylindrique. L’entrée comporte deux arcs surbaissés édifiés en pierre de taille et sa surface est décorée par un médaillon portugais de forme rectangulaire qui représente le roi Alfonso V. Le couloir intérieur en coude, aujourd’hui à ciel ouvert, possédait jadis un étage en plancher ou en voûte formant un abri couvert, casemate, où se trouvaient deux gros canons qui assuraient la défense de la partie sud de la ville.

Le Centre Hassan II des Rencontres Internationales

Cet édifice, situé dans la Kasba, en face de la Grande mosquée, fût construit en 1986 sur les décombres d’un bâtiment délabré qui servait jadis, comme caserne à l’armée d’occupation espagnole. A l’époque portugaise, son emplacement abritait le château du gouverneur dont il ne reste aujourd’hui que l’imposant donjon (Borj al Kamra) qui se dresse à l’angle nord-ouest de la Kasba.

Le centre Hassan II, dont l’architecture est bien intégrée dans le tissu ancien de la médina, est un bâtiment composé d’un corps central couvert d’un toit pyramidal, entouré de galeries destinées aux expositions artistiques et d’une salle polyvalente, munie d’un pavillon de traduction simultanée, réservée aux rencontres et aux activités culturelles.

Le palais Raissouni

C’est une demeure luxueuse de style traditionnelle située dans la partie ouest de la médina. Elle fût construite, comme son nom l’indique, par le chérif Raissouni en 1906 lorsqu’il fût nommé pacha de la ville d’Assila. Elle est composée d’une partie résidentielle en deux niveaux avec des dépendances et un jardin.

En 1998, le palais Raissouni a subi une opération de restauration et de réhabilitation dont le financement a été assuré par le prince saoudien Bandar Ibn Soltan. Ce projet a permis de sauvegarder la configuration spatiale traditionnelle du palais et de valoriser ses particularités architecturales originales.

Actuellement il abrite un complexe culturel composé d’un logement d’artistes, d’ateliers d’art plastique et de sculpture, d’espace d’activités culturelles et artistique et d’une maison d’hôte, au niveau du premier étage, réservée aux invités d’honneur de la ville. Le bâtiment sert également de siège à l’université estivale al Moutamid Ibn Abbad qui y organise ses rencontres et ses débats culturels à l’occasion du festival annuel d’Assila.

Plan Assilah

Le plan de sauvegarde de la médina d’Assila

Le Plan d’Aménagement et de Sauvegarde de la Médina d’Assilah, homologué le 15 Septembre 2009, a pour objectif principal de proposer aux acteurs institutionnels et aux services concernés un outil technique comportant un plan structuré d’actions visant à développer la médina en tant que pôle culturel et économique. Il est formalisé dans trois types de documents :

  • Un document graphique à l’échelle 1 /1000ème qui propose des interventions visant la conservation des principaux témoignages historiques et architecturaux de la médina, la sauvegarde de la voirie traditionnelle, la restructuration de la voirie au niveau de la zone environnante de la médina, la restauration et la rénovation de l’habitat et l’organisation de l’activité commerciale.
  • Un règlement de sauvegarde et d’aménagement qui met en place les conditions réglementaires pour gérer le mouvement de construction intra-muros et le développement de l’espace environnant de la médina suivant des normes respectant les valeurs et les caractéristiques architecturales traditionnelles.
  • Un Cahier des Prescriptions Architecturales (CPA) contenant un référentiel normatif des éléments architecturaux caractéristiques de la médina d’Assila en vue d’assurer la sauvegarde de l’identité architecturale de ce tissu traditionnel  et de garantir la pérennité de sa lecture historique.

Le programme de réhabilitation et de valorisation de la médina d'Assila

En application des orientations royales concernant la sauvegarde de l’héritage culturel des médinas marocaines et dans le but de préserver le patrimoine architectural de la médina de d'Assila, de valoriser son potentiel patrimonial, de réorganiser ses activités économiques et promouvoir ses attractivité touristiques, la wilaya de la Région Tanger-Tétouan-Al Hoceima l'Agence Urbaine de Tanger en collaboration avec les différents départements concernés ont élaboré un programme de réhabilitation et de valorisation de ce tissu historique qui se compose de 4 axes principaux :

Plan Assilah
  • Le cadre bâti : ce volet concerne la consolidation et la réfection d'un ensemble de bâtiments menaçant ruine dans la médina et le réaménagement du tissu urbain intra-muros à travers les opération de pavage des rues, de réfection de l'éclairage publique, de renforcement des réseaux d'eau potable, d'électricité et d'assainissement, de mise en place du mobilier urbain, et d'installation d'une signalétique appropriée. Il est ég²alement question de réaliser l'ordonnancement architectural des façades de quelques axes principaux, l'aménagement de deux parkings dans le pourtour immédiat de la médina et la création de quelques équipements de proximité (une place, des toilettes publiques, un foyer féminin et une maison de jeunes).
  • Les monuments historiques : il s'agit de restaurer la deuxième partie de la muraille sud du côté de la Sqala, de faire des travaux de réfection au niveau l'école Ibn khaldoun, de restaurer et de réhabiliter d'autres monuments historiques de la médina (la tour Kamra, l'école "Tama Ghaylana" donnant sur la place Abdellah Guennoun et "Dar El Bacha donnant sur la place Ibn khadoun).
  • Les lieux de culte : le programme prévoit la restauration de la mosquée-zaouia "Sidi Mbarek", la mosquée-zaouia "Derkaouia", la réalisation des travaux de réfection au niveau de la mosquée "Zekkouri" et la restauration des mausolées "Sidi Ahmed Tayeb Bakkali Al Assili", "Sidi Ahmed Ben Merzouk", "Sidi Ahmed Ben Mansour" et "Lalla Mennana" en plus de la reconstruction d'une synagogue.
  • Les activités économiques : pour donner une allure patrimoniale et authentique aux locaux commerciaux de la médina, le programme prévoit l'installation d'auvents et de panneaux signalétiques en bois respectant le cachet traditionnel en vigueur. Il prévoit également, dans le but de promouvoir le produit touristique local, la mise en œuvre d'actions d'accompagnement telle l'élaboration de cartes touristiques, la mise en place de points d’Information touristique et d'un système vidéo surveillance en plus de la réalisation d'applications mobiles dédiées à la promotion touristique.
  • Les circuits touristiques : pour redynamiser l'activité touristique de la médina et garantir une bonne présentation de ses potentialités patrimoniales, le programme vise la création de 3 circuits touristiques qui sont "le circuit de la muraille", qui permet de découvrir le système défensif de la médina avec ses portes, ses tours, ses batteries et son chemin de ronde, "le circuit religieux" qui parcourt les différents bâtiments religieux existants tels les mosquées, les zaouias et les mausolées et "le circuit commercial" qui facilite la découverte des bazars, des ateliers de métiers traditionnels et des locaux de vente des produits artisanaux.