L’histoire de la ville de Tanger, comme terre d’accueil, a été marquée par la présence successive de plusieurs courants civilisationels et culturels, apportés par les flux de populations de nationalités diverses (portugaise, espagnole, italienne, française, anglaise et américaine).
La production architecturale, comme reflet des différentes époques succédées, traduit la diversité et la richesse des styles de pensées et de consommation de l’espace prévalant à chacune de ces étapes de l’histoire de la cité tangéroise, comme en témoignent encore certains édifices situés dans les secteurs extra-muros de la ville.
Or, sous l’effet de l’urbanisation accrue et de la densification soutenue des secteurs en question, force est de constater qu’une partie non négligeable de ces bâtiments se trouve actuellement menacée par les tentations de spéculation, cherchant la rente dans la valeur du support foncier de la bâtisse, plutôt que dans sa valeur patrimoniale et historique.
En outre, il est connu qu’à Tanger, seuls quelques monuments sont protégés légalement, par effet d’inscription ou de classement. Autant de facteurs rendent ainsi d’actualité la généralisation des mesures conservatoires à d’autres composantes monumentales dont notamment les immeubles d’intérêt patrimonial et architectural de la zone extra-muros, témoins de l’architecture de la deuxième moitié du 19ème et du début du 20ème siècle.
L’histoire urbaine de Tanger depuis le XIX éme siècle est étroitement liée à son statut de capitale diplomatique.
En effet, les représentants consulaires des pays étrangers, installés dans le périmètre intra-muros de la médina, et la classe sociale commerçante et bourgeoise, attirée par la vitalité commerciale de la ville, ont édifié des constructions caractérisées par une typologie architecturale et décorative européenne. Ainsi, à partir de 1880, la médina de Tanger va subir une série d’interventions architectoniques de style variées qui vont certainement transformer l’allure générale de certaines rues et modifier une partie de son cachet traditionnel, mais qui vont également marquer, à jamais, son cosmopolitisme qui constitue sa richesse et sa particularité (ces transformations vont motiver la création en 1883-1884 par Dr Cenarro de la commission d’hygiène et de voirie qui fût le premier organisme international chargé des questions urbanistiques à Tanger ).
L’exemple éloquent de cette européanisation est le petit Socco (Souk Dakhel) , qui a constitué par ses banques et ses cafés un véritable centre d’affaires et de commerce de niveau international.
C’est au sud de la médina, dans les quartiers Beni Idder et Oued Aherdane, où sont concentrées les constructions de style européen. Ce style est caractérisé par de grands immeubles en deux ou trois étages, avec des façades composées de balcons à portes-fenêtres et à garde-corps en ferronnerie et bois ajouré (style espagnol) et des façades dotées de chapiteaux, aux angles des murs, de corniche et d’étage attique (style français). Les exemples de façades de style mixte, arabo- islamique et européen ou « hispano-mauresque » sont aussi présents notamment le long de la rue Siaghine.
A la fin du XIXème siècle, l'apparition de la ville extra-muros se fait pleinement sentir devant le manque d'espace intra-muros et face aux nécessités grandissantes de commerce et d’habitation.
La première extension extra-muros se fait le long des murailles à travers des quartier ou des ensembles architecturaux de style européen qui forment une ceinture urbaine tout autour de la médina , (bâtiments de la rue d’Italie, de la rue de Tétouan, de la rue Sallah Din al Ayoubi etc,….) ou à travers des édifices individuels remarquables (Hôtel Continental, hôtel Villa de France bâtis respectivement en 1860 et 1861). Au même temps, le plateau de Marchan, et le promontoire de Jbel kbir, à l'ouest de la ville, connaissent une urbanisation parallèle sous forme de résidences, de propriétés luxeuses et d'institutions d'importance (villa Mokri, palais Tazi, palais Forbes etc…)
Le développement urbain au Sud et au Sud-est de la médina s'opère, au premier lieu, par la réalisation d'un certain nombre d’édifices repères et d'œuvres publiques (La maison de la dette Marocaine, où siège actuellement la Délégation Régionale de Tourisme, construite en-1910, le grand théâtre Cervantès en 1913, le café de Paris en 1920, l’Hôtel el Menzah en 1928…).
Ce développement s’accélère, dans un deuxième temps, pour aboutir à l’ossature générale de la ville nouvelle et à sa structure caractérisée par une artère principale de 230m appelée boulevard Pasteur et une frange littorale longeant l’avenue d’Espagne où se situent les bâtiments de Renshhausen (Avenue d’Espagne).
Toutefois, ce patrimoine est menacé, de nos jours, de disparition à cause du rythme accéléré de l’urbanisation et l’impact du phénomène de la spéculation immobilière et de son état de dégradation inquiétant qui est dû à plusieurs facteurs intrinsèques et extrinsèques (usure et vieillissement, manque d’entretien, mauvaise occupation, travaux de construction et de réfection non intégrés…). Les pertes sont déjà considérables si on compte le nombre de bâtiments disparus ou défigurés dans les dernières décennies, et les tendances négatives sont toujours présentes dans la ville.
Pour pallier à ce processus de disparition et de détérioration, une série de mesures prioritaires de protection réglementaire ont été réalisées par l’Agence Urbaine de Tanger :
L’ancienneté de l’immeuble et son état de conservation. |
La valeur esthétique de l’immeuble. |
Le style et le cachet architectural de référence de l’immeuble. |
L’histoire liée au bâtiment. |
Les vues, les perspectives et les ordonnancements qui ont marqué et façonné l’imaginaire et la perception de la ville, aussi bien chez le tangérois que chez le visiteur. |